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Les demandes d’amendements présentées par les provinces aux autorités impériales sont systématiquement rejetées et toute action proposée par les autorités britanniques à l’initiative des provinces est considérée à Londres comme une ingérence inopportune dans les affaires canadiennes.  Bien que certaines des modifications constitutionnelles de cette période soient susceptibles d’affecter les droits et les intérêts des provinces, le consentement des provinces à ces modifications n’est ni demandé par les autorités fédérales, ni donné par les autorités provinciales, ni fait l’objet d’une enquête de la part des autorités impériales.

N‘oubliez pas qu’il s’agissait de l’époque glorieuse de l’hégémonie fédérale.  Quelle époque pour un juriste fédéral !  Au cours de cette période de quarante ans, 88 lois provinciales ont été désavouées par le cabinet fédéral et le pouvoir déclaratoire a été utilisé 353 fois par le parlement.8  Il n’est pas surprenant qu’au cours de cette période, la légitimité politique des amendements à la constitution canadienne ait été identifiée aux seules autorités fédérales.

Les soixante années suivantes — Le particularisme provincial prospère

Pendant le reste des cent premières années de la Confédération, nous assistons non seulement à la consolidation de l’autonomie politique canadienne vis-à-vis des autorités impériales, mais aussi à la fragmentation, au sein du Canada, de cette autorité politique en matière de modification constitutionnelle.

La consolidation de l’autonomie politique du Canada a été accélérée par notre participation à la Première Guerre mondiale et confirmée après la guerre.  La conférence impériale de 1926 a adopté la déclaration Balfour, qui stipule que les dominions (comprenant le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Union sud-africaine, l’État libre d’Irlande et Terre-Neuve) sont des “communautés autonomes au sein de l’Empire britannique, égales en statut, en aucun cas subordonnées l’une à l’autre dans quelque aspect que ce soit de leurs affaires intérieures ou extérieures”.  Cela signifie, entre autres, que la responsabilité politique des affaires canadiennes est clairement reconnue comme relevant du Canada et non du Royaume-Uni.  Le gouverneur général doit agir sur les conseils de ses ministres canadiens, et non sur les instructions de Londres.  Le souverain sera conseillé sur les affaires canadiennes par ses ministres canadiens.  Le Parlement britannique n’adoptera pas de lois pour le Canada, y compris des amendements constitutionnels, sans que le Canada ne le lui demande.  Ces principes, qui, à des degrés divers, étaient devenus une pratique acceptée dans les affaires du Dominion, ont été reconnus dans la Déclaration Balfour et certains d’entre eux ont été codifiés par le Statut de Westminster de 1931.  Ainsi, dans cette période d’entre-deux-guerres, il a été clairement confirmé que la


8. La Forest, Disallowance and Reservation of Provincial Legislation (1955), p. 83-96 ; Le pouvoir déclaratoire du Parlement (1969), p. 123-45.

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