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L’autre grand type de critique qui a été soulevé au sujet des aspects juridiques concerne la question de savoir si ce rapatriement est réellement définitif.  Il est vrai qu’en entreprenant le rapatriement par l’action du Parlement du Royaume-Uni, nous avons été confrontés à un certain dilemme logique.  Nous demandions cette action à un parlement souverain et, selon la théorie constitutionnelle britannique conventionnelle, un parlement souverain peut tout faire sauf se lier lui-même ou lier ses successeurs.  En d’autres termes, il ne peut jamais s’empêcher de changer d’avis, ni empêcher les futurs parlements de défaire ce qu’il a fait.  Certains ont donc suggéré que nous ne pourrions jamais mettre fin à l’autorité législative du Parlement britannique sur le Canada parce que lorsque Westminster a prévu, comme il l’a fait à l’article 2 de la loi sur le Canada, que ses lois futures ne s’appliqueraient pas au Canada, il ne pouvait pas s’empêcher d’abroger cet article à l’avenir et de recommencer à légiférer en notre nom.

Cette préoccupation reflète peut-être une certaine confusion qui a prévalu dans une grande partie du document sur le rapatriement — une confusion entre le droit national et le droit international.  On nous a parfois demandé, par exemple, comment nous pouvions soutenir que les conventions élaborées au Canada concernant la modification de la constitution canadienne n’avaient aucun effet juridique, tout en estimant que le Royaume-Uni ne pouvait pas légiférer pour le Canada sans notre consentement.  Si la question n’a jamais été mise en avant dans le cadre du litige, elle est apparue de temps à autre dans la rhétorique.  Bien que le gouvernement fédéral n’ait jamais eu à prendre position sur cette question, j’ai toujours été d’avis que les relations entre le Canada et le Royaume-Uni sont régies par le droit international et qu’en droit international, les pratiques et les conventions peuvent se transformer en lois alors qu’elles ne le peuvent pas au niveau national.  Les conventions régissant les relations entre les pays du Commonwealth, telles qu’elles se sont développées dans la pratique et ont été partiellement confirmées dans le Statut de Westminster de 1931, ont pris force de loi.  Par la suite, en vertu du droit international, le Canada aurait pu ne pas tenir compte de la législation adoptée par le Parlement du Royaume-Uni, à moins qu’elle n’ait été adoptée conformément aux exigences de ce droit.  Si j’étais obligé d’argumenter sur l’effet en droit international de notre récente demande au Royaume-Uni et de sa réponse par l’adoption de la loi canadienne de 1982, je dirais qu’il s’agit d’une confirmation de l’abandon définitif de l’idée de l’indépendance du Royaume-Uni.  Je dirais que c’est la confirmation de l’abandon définitif de la souveraineté législative sur le Canada et la preuve d’un accord entre deux pays souverains qui ne pourra plus être ignoré unilatéralement par l’un d’eux à l’avenir.  Pour parvenir à cette conclusion, j’invoque les mots de l’honorable Ivan Rand dans sa célèbre conférence Oliver Wendell Holmes à Harvard en 1960 sur “Certains aspects du constitutionnalisme canadien”.  Il a fait référence aux conventions régissant les relations entre les pays du Commonwealth et a déclaré que leur force juridique ne pouvait être inférieure à celle-ci :

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