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Après avoir appelé à l’aide la grande mère des parlements, que lui avons-nous demandé de faire ?  Tout d’abord, nous lui avons demandé d’adopter la loi sur le Canada, une loi très courte, qui ne comporte que quatre articles, mais qui est assortie d’une annexe très volumineuse contenant les principaux amendements.

Deuxièmement, nous avons demandé au Parlement britannique de mettre fin à son autorité sur notre constitution.  C’est ce qu’il a fait en adoptant l’article 2 de la loi sur le Canada, qui stipule qu’aucune future loi britannique ne s’appliquera au Canada, qu’il s’agisse d’une loi constitutionnelle ou de toute autre forme de loi.  Il a également précisé qu’à l’avenir, les amendements à notre Constitution ne devraient être apportés que conformément à la nouvelle procédure d’amendement canadienne.

Troisièmement, nous avons demandé à Westminster de donner un fondement moderne à notre Constitution en stipulant expressément que la Constitution du Canada est la loi suprême du pays.  Il s’agissait en fait d’une reformulation moderne d’une règle qui dépendait auparavant de l’article 2 de la loi de 1865 sur la validité des lois coloniales.

Quatrièmement, nous avons encore “canadianisé” la Constitution en demandant à Westminster de légiférer pour nous, pour la première fois dans notre histoire constitutionnelle, à la fois en anglais et en français.  Pour une grande partie de notre Constitution, bien sûr, il n’existe toujours pas de version française officielle, une situation à laquelle nous espérons remédier dès que possible grâce à l’utilisation de la nouvelle formule d’amendement.

Plusieurs critiques ont été émises quant à la légalité et à l’efficacité juridique de ce processus de rapatriement.

Certaines attaques étaient fondées sur l’argument selon lequel le Parlement et le gouvernement du Canada ne pouvaient pas légalement demander des modifications constitutionnelles affectant les intérêts des provinces sans le consentement de ces dernières.  Cette opposition a été longuement argumentée dans les renvois faits par les provinces du Manitoba, du Québec et de Terre-Neuve devant leurs cours d’appel, et par plusieurs provinces devant la Cour suprême du Canada dans les appels interjetés par les cours provinciales dans ces mêmes renvois.  Cet argument a été rejeté en tant que proposition de droit par la Cour suprême du Canada, qui n’a trouvé aucun obstacle juridique à ce qu’une telle demande soit faite par les autorités fédérales,2 même si une majorité de la Cour, dans le même arrêt, a estimé qu’une telle façon de procéder était contraire aux conventions ou aux pratiques politiques de la constitution.  Un argument étroitement lié, avancé par plusieurs provinces, était que même si les autorités fédérales pouvaient faire une telle demande, le Parlement du Royaume-Uni ne pouvait pas la mettre en oeuvre sans le consentement des provinces.  L’article 4 du Statut de Westminster de 1931, qui exige spécifiquement la demande et le consentement d’un Dominion pour que la législation britannique s’applique à ce Dominion, signifiait que les demandes et les consentements provinciaux étaient également nécessaires.  En d’autres termes, le mot “Dominion” doit être pris dans ce contexte


1.  Re Resolution to Amend the Constitution [1981] 1 S.C.R. 753 à 773-84.

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